Le marquis Armand de Cubières (1806-1856), personnalité de Larue

Le marquis Armand de Cubières était un homme cultivé, amateur de littérature, de poésie, de chant et de musique.

La naissance à Larue le 9 mai 1806 de son fils Armand fut une grande joie pour le marquis Simon Louis Pierre de Cubières, alors âgé de 58 ans. Certes, il avait eu de Mme de Bonneuil, hors mariage, un fils âgé maintenant de 20 ans, le futur général Amédée Louis Despans-Cubières ; et certes, son épouse (depuis six mois) Marie Marchal, âgée de 38 ans, avait de son premier mariage avec Nicolas Olive quatre enfants qu’il chérissait comme s’ils étaient les siens ; mais Armand était son seul fils légitime, auquel son titre de marquis serait transmis à son décès.

Armand de Cubières est élève au collège de Bourbon (actuel lycée Condorcet) à Paris et remporte plusieurs prix. Il y noue une amitié durable avec un condisciple, le futur écrivain et critique littéraire Charles Augustin Sainte-Beuve. À 14 ans, il entre aux Pages des Écuries du Roi à Versailles. Il a 15 ans quand son père décède le 10 août 1821 à près de 74 ans ; le voici désormais marquis de Cubières à son tour. En fin 1824, il entre aux Gardes du Corps du Roi, puis devient « écuyer surnuméraire » à partir d’avril 1826, logeant à la Petite Écurie du Roi. Il s’y lie d’amitié avec le professeur de littérature de l’école des Pages, le poète Théodore Carlier. À son contact et à celui de Sainte-Beuve, il développe son goût pour la littérature et la poésie, à laquelle il s’essaye alors, un de ses poèmes étant publié en 1830.

La Révolution de juillet 1830 et le changement de dynastie qui s’en suit viennent bouleverser sa vie. Attaché comme son père aux Bourbons, il leur reste fidèle et quitte bientôt comme eux la France, à l’exemple de bien d’autres légitimistes. Il s’installe en Allemagne, à Dresde, capitale du royaume de Saxe. Un ouvrage allemand indique qu’il y serait « membre de l’ambassade de France », mais qu’il abandonnerait au bout d’un certain temps ses fonctions, ne voulant plus rester au service du roi Louis-Philippe, par loyauté légitimiste. Il maîtrise bientôt assez bien la langue allemande pour faire des traductions et participer à la vie culturelle locale. Il épouse à Dresde le 8 décembre 1832 la belle comtesse Isabella von Baudissin, âgée de huit ans de moins que lui, qui partage son goût pour la culture, le chant et la musique. Elle est la nièce et la fille adoptive du comte Wolf von Baudissin, diplomate, écrivain et traducteur. Ce lien familial renforce encore la vie culturelle d’Armand. Il rencontre en 1834 le poète romantique Ludwig Tieck, auquel il chante en vers son admiration.

En janvier 1833, le marquis de Cubières se rend à Prague, pour rendre visite à la famille royale de Bourbon, qui y séjourne depuis trois mois en exil. Il a l’honneur d’assister aux leçons données au comte de Chambord (le prétendant légitimiste Henri V), alors âgé de 12 ans. Quoique vivant en Allemagne, Armand de Cubières est en relation avec des éditeurs français. En 1833 et 1834, il collabore à l’éphémère revue Le panorama littéraire en Europe en y publiant la traduction de trois pièces de théâtre allemandes et une ballade de sa composition. 

En 1835 et 1836, il fournit pour Le Plutarque français les notices biographiques de Charles X, Louis XII et Mazarin. Il séjourne quelques mois en France en 1837, y revoyant famille et amis, et s’y faisant de nouvelles relations. Il déménage en 1838 à Fulda, petite ville de Hesse, où il tient avec son épouse un salon littéraire et musical apprécié de l’élite locale, notamment du poète Franz von Dingelstedt. Il y joue avec brio des œuvres de Chopin au piano. En 1839, trois ans après la mort de sa fille aînée Maria, il perd son fils Henri en bas âge et, avec lui, l’espoir de transmettre son titre de marquis ; il ne lui reste qu’une fille, Isabelle, née en 1835. En 1840, il signe un contrat avec l’éditeur allemand Friedrich Perthes pour traduire en français les cinquante premières fables pour enfants du poète Wilhelm Hey.

Armand de Cubières divorce en janvier 1844 et rentre en France, vivant une partie du temps à Larue, où il s’installe à demeure après la mort de sa mère en 1850. Malgré l’appui de Sainte- Beuve en septembre 1844, un drame dont il est l’auteur ne sera jamais joué. De 1852 à 1854, il s’occupe de la succession de ses amis amateurs d’art le duc et le comte de Feltre, choisissant le musée des Beaux-arts de Nantes pour la reprise de leurs collections.
Le marquis Armand de Cubières s’éteint à Larue le 3 novembre 1856, âgé de 50 ans. Sa fille Isabelle hérite de ses biens à 21 ans ; elle quitte Larue à son mariage le 18 août 1860.

Marc Ellenberger, archiviste municipal
Janvier 2013

 

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