Chevilly-Larue au lendemain de la Libération - 2e partie

Le 30 août 1944, les 9 membres du Comité local de Libération et 5 anciens conseillers municipaux élus en 1935 forment ensemble un conseil municipal provisoire. L’effectif du conseil passe de 14 à 17 membres dès son installation le 20 septembre, avec l’adjonction de trois représentants d’associations : René Lacour (Mouvement national des prisonniers de guerre et déportés), Louise Gross (Union des femmes françaises) et Suzanne Sautet (L’Assistance française), veuve du résistant François Sautet, fusillé le 11 août 1942. Ce conseil auto-proclamé est validé le 26 septembre par le préfet sous la désignation officielle de délégation spéciale ; les trois mêmes hommes restent à la tête : Paul Hochart, président faisant fonction de Maire, et deux vice-présidents faisant fonction d’adjoints, Jacques Teulet et Louis Bourliaud. La délégation se réunit 6 fois d’octobre 1944 à mars 1945 avec des ordres du jour chargés pour régler les affaires courantes et répondre aux besoins en cette période difficile. À l’approche des élections municipales du 29 avril 1945, elle témoigne de son activité dans un compte rendu de mandat du 25 mars. La majorité de son contenu est lié directement à la guerre : récapitulation des actions de ravitaillement de la population en aliments et en combustibles ; ouverture d’un chauffoir dans la salle des fêtes durant la période de grand froid ; organisation d’une souscription ouverte en faveur des membres des équipages des deux chars qui ont pénétré les premiers à Chevilly-Larue le 25 août (le tiers de la somme recueillie étant remis à la famille du soldat tué ensuite au cours des combats à Paris) ; épuration menée par une commission d’enquête temporaire (sans grands résultats, faute de preuves écrites) ; cotisation à l’Union amicale des maires patriotes (dont M. Hochart est vice-président) ; hommage aux morts pour la France en donnant un éclat exceptionnel à la cérémonie du 11 novembre et en changeant le nom de plusieurs rues ; organisation de cours de préparation militaire en février pour les jeunes gens ; aide à l’œuvre du colis du soldat pour les militaires chevillais ; parrainage de la 6e batterie du 32e régiment d’artillerie, qui comprend quelques Chevillais. Après la Libération, pour continuer la guerre jusqu’à la victoire, des Chevillais se sont engagés dans l’armée, tels trois jeunes résistants dans le 1er régiment de chasseurs parachutistes, André Lavigne, Marcel Jolivet et Raymond Bruin ; ces deux derniers sont tués au combat en Alsace, respectivement le 14 décembre 1944 et le 27 janvier 1945, morts pour la France. La délégation spéciale se préoccupe des absents et de leurs familles ; elle verse une subvention au Centre d’entraide des prisonniers de guerre ; elle fournit du charbon aux familles de déportés. La progression des forces alliées en Allemagne donne l’espoir du retour prochain des travailleurs forcés, des prisonniers de guerre et des rescapés des camps de concentration. Un centre d’accueil pour les rapatriés est organisé au séminaire. Pour beaucoup de familles, c’est enfin la joie du retour de l’absent, souvent bien affaibli, au bout de quelques années de séparation ; pour d’autres, c’est la tristesse de la nouvelle, souvent tardive, de sa disparition, tels les Hiltbrand qui apprendront ainsi que leur gendre René Estrade, prisonnier de guerre en Prusse orientale, y a été tué lors des combats le 19 mars 1945. Un recensement des déportés et internés revenus des camps donne notamment les noms de Georges Bletzacker, Camille Bougant, Germaine Folkert, Frédéric Dupradeau, Léon Elmélik, Jacques Guilbert et Pierre Sagnac.

Dans la continuité de l’union réalisée dans le Comité local de Libération, les mouvements locaux de Résistance constituent une liste commune pour les élections municipales du 29 avril 1945. À l’issue du scrutin (lors duquel les Chevillaises ont voté pour la première fois), cette liste devance largement la liste des « Républicains indépendants » et remporte tous les sièges (21). Le conseil municipal est installé le 2 mai ; deux femmes élues y figurent pour la première fois : Marcelle Vol et Hortense Guny. Ce triomphe électoral local de la Résistance anticipe de quelques jours la capitulation de l’Allemagne le 8 mai. La joie de la victoire est mitigée par le deuil de ceux qui sont morts pour la France. La ville de Chevilly-Larue veillera à leur rendre hommage et à cultiver la mémoire de leur sacrifice.

 

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